dimanche 3 janvier 2010

Intérêt du Personal Knowledge Management en organisation

Résumé :
Un grand mérite de la Gestion Personnelle des Connaissances* (PKM) est de remettre l’utilisateur au centre du dispositif KM. Certes ses enjeux en organisation paraissent modestes relativement à d'autres leviers d'action KM. Mais, peu coûteux en moyens, le PKM permet d'obtenir des résultats rapides auprès des opérationnels. Idéal pour le Knowledge Manager qui doit d'abord faire ses preuves.
I. Gagner en performance dans l'utilisation de l'information

Les promoteurs du PKM n'hésitent pas à s'opposer aux approches centrées sur la codification ou sur l'échange de connaissances. Ils avancent pour cela 2 arguments :
  1. La surabondance d’informations est l'obstacle majeur rencontré par un grand nombre de collaborateurs. Dans ces conditions, les projets qui se bornent à créer des nouveaux espaces d’échanges ou à capitaliser de nouvelles connaissances sont des projets qui échouent. (cf. le très bel exemple donné par Dave Pollard)
  2. Gagner en efficacité dans la gestion de ses informations et connaissances opérationnelles est un résultat dont tout collaborateur est preneur.
    A l'inverse, partager ses connaissances en dehors des projets est une tâche supplémentaire dont le salarié tire peu de bénéfice opérationnel et dont l'organisation ne perçoit pas les résultats.

Le PKM se distingue en apportant des outils et des méthodes applicables par l'opérationnel, pour l'opérationnel, à son niveau individuel. Ils lui permettent de :
  • Réduire le bruit informationnel, tirer partie de ses sources : personnes à sonder, usage des sources internes et externes à l'organisation, outils de recherche, efficacité des requêtes
  • Repérer les changements et nouveautés importants pour son travail : hiérarchiser ses besoins, organiser sa veille
  • Mieux gérer les informations entrantes : consulter et traiter efficacement ses mails, gérer les alertes et abonnements, gérer son temps de consultation
  • Classer, annoter et retrouver les informations utiles : Classer efficacement, capturer ses découvertes numériques (taguer, ajouter aux favoris, télécharger), protéger et sauvegarder ses données, gestionnaire de mots de passes, etc.
  • Manipuler efficacement les contenus (Personal CMS) : convertir, fusionner, fractionner, comparer, extraire, présenter.
Le Personnal Knowledge Management est d'autant plus appréciable par les collaborateurs que leur performance est évaluée à leur niveau individuel, c'est-à-dire au niveau des missions prescrites.


II. L'utilisateur de la connaissance : un levier de progrès parmi d'autres

Le PKM optimise donc le travail de consommation des informations et des connaissances. Il reste que, en organisation, le manager des connaissances dispose d'autres leviers d'action, souvent plus puissants pour la création, la diffusion et l'accès aux connaissances.
En effet :
  1. Si l'on s'en tient au problème de l'infobésité, les leviers les plus efficaces en organisation se situent très souvent au niveau des sources et des diffuseurs d'informations et connaissances : directions métiers, juridique, technique, services documentaires, archives, communication, risk management etc., mais aussi les collaborateurs eux-mêmes lorsqu'ils éditent des contenus réutilisés plus tard par leurs collègues.
    Et ce pour une raison simple : ce sont les personnes qui  maîtrisent et produisent  les connaissances qui sont les plus à même de dire dans quels cas elles sont utiles et, par suite,  de déterrminer  dans quelles situations et à quels collaborateurs l'organisation doit les transmettre. En agissant à ces niveaux amont du cycle de vie de la connaissance, le knoweldge manager peut apporter une très grande valeur ajoutée à son organisation. 
    Ainsi, chez un assureur, des gains de plusieurs dizaines d'ETP ont ainsi été réalisés dans des tâches de recomposition documentaire désormais réalisées au siège. Ces économies ont été réalisée en mutualisant et rationnalisant les tâches de transformation et de personnalisation de l'information.
  2. De même et corréaltivement, la pertinence des dispositifs (notamment les moteurs) de recherche des contenus utiles, dépend en grande partie du contenu des productions et des opérations de publication et de référencement réalisées avec les experts (ou "sachants"). En comparaison, la pratique PKM de tagging des contenus par les utilisateurs  a un effet dérisoire pour l'organisation, hormis pour l'individu ayant lui-même apposé les tags.
  3. Certaines connaissances ou certains dispositifs de partage constituent en eux-mêmes des solutions efficaces à la surabondance d’informations. Les outils de gestion de données techniques (GDT) sont exemplaires à cette égard : la quantité de données disponibles est démultipliée, elle est pourtant  beaucoup plus facile à manipuler en comparaison par exemple des référentiels matériaux. De même, dans les domaines de la R&D, du conseil et de l'assistance, la mise en place d'un retour d'expérience projet ou essai permet d'opérer des économies considérables sur les tâches de recherche d'informations ou de sources de connaissances (collègues, documents, calculs, etc.).
  4. Beaucoup de problèmes KM dépassent celui de la surabondance des informations à gérer. Faciliter les échanges à distance entre collègues, prévenir la reproduction d'erreurs coûteuses, optimiser le partage des informations projet, permettre l'identification d'experts sur un sujet pointu, homogénéïser la documentation de référence, etc., sont des missions fréquentes du KM irréductibles au problème de l'infobésité. 

III. Le Knowledge Manager et le PKM

Le PKM est donc une corde parmi d'autres à l'arc du Knowledge Manager. Sa spécificité est toutefois de pouvoir engendrer en peu de temps des bénéfices opérationnels, significatifs pour les "travailleurs de la connaissance" (chercheurs, consultants, concepteurs, développeurs, auditeurs, etc.) ou pour les professionnels qui gèrent au quotidien un grand flux d'informations (chef d'entreprise, manager, chef de projet, etc.).
Il permet donc au KMer de "faire ses preuves" avec peu de moyens : une aubaine pour les initiateurs ou les leaders du KM en organisation, en particulier s'ils ont des difficultés à convaincre leur direction ou les managers de l'opportunité de leurs actions.
Le PKM sera ainsi  intégré avec profit au prestations du service KM, par exemple aux actions d'accompagnement au transfert de poste ou au départ d'expert. Il peut aussi faire l'objet de formations ou d'ateliers proposant aux opérationnels des solutions directement applicables. Au passage, le KMer en profitera pour montrer que, au profit des opérationnels, des leviers KM plus importants pourraient être actionnés dans l'organisation.

* Bien que Personal Knowledge Management soit le plus souvent traduit par "gestion des connaissances personnelles" (par exemple par le spécialiste Christophe Deschamps sur Outilsfroids), je préfère traduire ici PKM par "gestion personnelle des connaissances" tant il se distingue par les moyens personnels de management de connaissances qu'il propose. Certes, certains auteurs mettent sous la bannière PKM des solutions de management des connaissances personnelles à l'individu au profit de l'organisation. Cependant, bien qu'elles manifestent d'un indéniable pragmatisme, il me semble que ces solutions apportent peu de nouveauté par rapport au KM plus classique (par exemple les annuaires de compétence).  Il faudrait d'ailleurs sans doute revenir plus en détail sur les différences et points communs entre PKM, PIM, efficacité personnelle et KM.

2 commentaires:

  1. Un billet remarquablement clair et complet, merci.

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  2. Je vous recommande le blog de Harold Jarche, qui préfère parler de "networked learning" au lieu de "personal knowledge management. http://www.jarche.com/category/pkm/ C'est surtout une évolution du rôle des médias sociaux dans la gestion personnelle des connaissances.

    Pour ma part, je suis avec vous, je préfère "gestion personnelle des connaissances." Il s'agit de gestion personnelle plus que de connaissances personnelles.

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